Aller au contenu principal

Les maîtres et les autres

Il y a deux types d'adeptes les maîtres et les autres.

Mais n'y a t-il pas des dégradés possibles entre les deux ? Et qui sont les maîtres et qui sont les autres ?

En fait, si l'on parle uniquement de la pratique posturale, on peut classer les postures en trois catégories : débutants, intermédiaires, avancés. Parfois certains font plus clairement la distinction entre deux catégories : débutants et avancés. Oui, mais dans ce cas pour quelles raisons il n'y aurait que deux catégories d'adeptes ?

Il ne faut pas tout mélanger. Les asanas sont un des multiples aspects de la pratique sur lesquels on focalise trop souvent. D'autres techniques comme les kriyas, le pranayama, les mudras, pour ne citer que celles-là, font aussi partie du yoga. Aussi, il y a le pranayama pour débutants et pour élèves avancés. Pour ce qui est des postures, les classer permet de proposer une démarche vis à vis de leur pratique. Je peux peut-être passer plus facilement telle ou telle posture car elle fait partie des postures dites pour débutants. Et les autres sont parfois plus difficiles, et donc elles font plutôt partie des postures pour adeptes avancés. Parfois, dans la pratique du yoga, on voit des personnes qui passent rapidement - voire parfois pour la première fois – des postures dites avancées. Mais ces personnes sont-elles parvenues à l'illumination pour autant ? Non, bien évidement … Il me semble logique ici d'indiquer que l'inverse existe également : des personnes qui n'arrivent pas du tout à passer certaines postures dites pour débutants, alors que d'autres pour avancés leur sont accessibles.

On conçoit ce qu'est un maître : c'est quelqu'un qui est réalisé, il est directement relié au divin. En fait, c'est un être capable de soigner les gens, sans pour autant se considérer comme étant plus élevé qu'un autre. Il en impose de fait, sans vouloir en imposer pour autant, il vit une discipline qui inspire le respect. Il est insensible aux critiques, il est aussi insensible aux louanges. Il partage avec peu de gens son expérience spirituelle, car dans le fond, il ne connaît pas de mot permettant d'en parler de façon à ce que nous puissions y comprendre quelque chose. Les vérités des maîtres sont très difficiles à appréhender. Mais ils sont si particuliers que vous sentez en leur présence leur condition d' « être éveillé ». Attention, s'ils sont éveillés, s'ils sont arrivés à l'illumination, ils ne sont en rien des illuminés. On peut dire que le saut spirituel entre l'être éveillé et le non éveillé est si important que les considérations sur les postures de yoga ou les autres pratiques yogiques sont totalement déplacées. Et paraissent futiles voire mesquines, et elles le sont !

Cependant, il existe des classifications de niveaux. Ceux-ci sont décrits dans des textes sacrés. Je fais référence aux 7 Boumikas ou niveaux de connaissance et aux huit membres du Raja Yoga qui seront développés dans d'autres articles. Mais la lecture de ces niveaux est possible pour des personnes très éveillées voire pour des maîtres. Dans ce contexte, se considérer comme étant à tel ou tel stade serait vraiment mal venu et présomptueux, l'égo étant l'ennemi numéro 1.

Revenons sur les asanas. Elles permettent de créer le lien entre le corps et l'esprit. Celui-ci cherche à contrôler la posture, il est attentif aux sensations, au vécu postural. Le corps ne ment pas, il est de fait le média le plus adapté à la démarche spirituelle. Nous avons besoin dans une telle démarche d'être guidés et nos sensations sont une des boussoles permettant d'affiner notre parcours. De ce point de vue, la notion de niveau n'a donc aucun sens, aucune justification.

Les maîtres et les autres ? Mais les autres, qui sont-ils ? Je réponds en soulignant que tous les autres, vous et moi, nous sommes tous des débutants. C'est pourquoi nous, élèves, nous, professeurs de yoga, nous nous devons de bien réfléchir lorsque nous évoluons dans nos pratiques. Ne pas se prendre au sérieux, ou se croire détenteur d'un pouvoir particulier, de capacités que l'on chercherait à montrer, de croire que le yoga résout tout et pour tout le monde, que ceux qui ne pratiquent pas sont des gens qui n'ont rien compris, car dans ce cas nous nous éloignons du but même du yoga. Ici vous comprendrez que le professeur risquerait lui-même de s'éloigner du monde, et là c'est qu'il y a quelque chose qui ne fonctionne pas. Les adeptes du yoga, professeurs et élèves, sont et doivent être des personnes intégrées à la société. Le maître l'est beaucoup moins, et ce n'est pas vraiment de sa responsabilité, sa condition d'être éveillé lui confère, de fait, un rapport aux autres différent.

Le yoga est avant tout une pratique faite pour madame et monsieur tout le monde. Il n'y a pas de discrimination, de classement, de niveau, à condition bien entendu que le professeur soit formé dans cette voie. La perspective qu'il n’y ait que deux types d'adeptes, les maîtres et tous les autres, c'est à dire que tous les autres soient des débutants sans exceptions, doit rassurer et permettre une croissance dans de bonnes conditions sur ce chemin.