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L'observateur est l'observé

Le cœur du message de Krishnamurti.

Le cœur du message de Krishnamurti

"L'observateur est l'observé", le cœur du message de Krishnamurti à travers et par le Prof. Samdhong Rinpoche, moine bouddhiste, Ancien Premier Ministre du Gouvernement Tibétain en exil, ami de Krishnamurti, articulé autour d'extraits d'un film sur K. tourné in situ dans les années 70.

Lorsque vous vous posez une question, quelle est l’entité qui recevra la réponse ? Et quelle est l’entité qui cherche à s’informer ? Si elle est une partie de votre conscience, une partie de votre pensée, elle sera incapable de trouver ce qu’elle cherche. Tout ce qu’elle peut trouver, c’est un état lucide. Mais si dans cet état il y a encore une entité qui dit : « Je dois être lucide, je dois m’exercer à l’être », ce n’est encore qu’une nouvelle image.

La perception du fait que l’observateur est l’observé n’est pas un processus d’identification avec l’observé. S’identifier à quelque chose est assez facile. C’est ce que font la plupart d’entre nous : ils s’identifient à leur famille, à leur mari ou à leur femme, à leur nation, ce qui conduit à de grandes souffrances et à des guerres.

Ce dont nous parlons est totalement différent, et nous devons le comprendre non pas verbalement, mais avec notre être le plus profond, alerté jusqu’à ses racines. Dans la Chine ancienne, un peintre, avant de commencer à peindre quoi que ce soit - un arbre, par exemple - s'asseyait devant son sujet pendant des jours, des mois, des années - peu importait le temps - jusqu'à « devenir » l’arbre. Il ne s’identifiait pas à lui, il était cet arbre. Cela veut dire qu’il n’y avait pas d’espace entre l’arbre et lui, pas d’espace entre l’observateur et l’observé, pas d’entité vivant sa perception de la beauté, du mouvement, de l’ombre, de la profondeur d’une feuille, de la qualité de sa couleur. Il était l’arbre totalement et en cet état seulement pouvait-il peindre.

Tout mouvement de l’observateur, s’il ne s’est pas rendu compte qu’il est l’observé, ne peut créer que de nouvelles séries d’images, où il se retrouve captif. Mais que se passe-t-il lorsque l’observateur est conscient d’être l’observé ? Examinez cette question lentement, très lentement, car nous entrons maintenant dans quelque chose de très complexe. Que se passe-t-il ? L’observateur, ainsi conscient, n'agit plus du tout. Il s’était toujours dit : « Je dois faire quelque chose en ce qui concerne ces images, les abolir ou leur donner de nouvelles formes »; il avait toujours été actif au sujet de ce qu’il observait, agissant et réagissant, soit avec passion, soit avec indolence. Ce mode d'action, basé sur le plaire et le déplaire, a toujours été qualifié de positif : « Ceci me plaît, je le retiens, cela me déplaît, je m’en débarrasse. »

Lorsque l’observateur se rend compte que ce sur quoi il agissait n’était autre que « lui-même » en sa qualité d’observateur, tout conflit cesse entre lui et ses images. Il est « cela », il n’en est pas séparé. Lorsqu’il s’en séparait, il agissait, ou essayait d’agir sur ce qu’il voyait, mais maintenant, sachant que ces tentatives s’exerçaient sur lui-même, le plaire et le déplaire ne sont plus en jeu, et le conflit cesse.

Que peut-il faire ? Que peut-on faire au sujet d’une chose qui est soi-même ? On ne peut ni se révolter contre elle, ni la fuir, ni même l’accepter. Elle est « là » ! Alors toute action qui provient des réactions du plaire et du déplaire parvient à sa fin, et on découvre une lucidité qui est devenue extrêmement vivante. Elle n’est tributaire ni de l’activité d’un centre, ni d’images. De son intensité se dégage une attention d’une qualité telle, que l’esprit – qui est cette lucidité – devient extraordinairement sensitif et hautement intelligent.

Krishnamurti – Se libérer du connu